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Forêt Ben bella à El Eulma : Un lupanar à ciel ouvert

dimanche 20 août 2006, , article écrit par Farid Benabid, Liberté et publié par La rédaction


La forêt Ben Bella, d’une superficie d’une dizaine d’hectares à la sortie est de la ville d’El Eulma et qui longe la RN5, doit son appellation à la première campagne de reboisement initiée par l’ex-président de la République Ahmed Ben Bella, en 1963, à travers l’ensemble du territoire national.

Cette forêt constitue un véritable poumon pour la ville et contribue à l’équilibre écologique de toute la région. Les familles venaient s’y promener et respirer un bol d’air frais, d’autres pour y pique-niquer durant les week-ends. Seulement, cette image d’Epinal s’est estompée au fil des années.
Aujourd’hui, c’est un véritable lieu de débauche. Un lupanar à ciel ouvert, à l’instar d’un deuxième ghaba Goutali, au sud-est de la ville. Pour s’y rendre, il faut quitter la route nationale et prendre un chemin de traverse qui mène vers une piste caillouteuse mais carrossable qui débouche sur une esplanade. Le spectacle est édifiant.
Les branches des arbres servent de porte-manteaux où des vêtements et sacs à main sont accrochés. Des troncs d’arbre et des grosses pierres servent de fauteuils sur lesquels sont assis des clients sirotant un verre d’alcool et des jeunes filles légèrement vêtues. Le ballet des véhicules de différentes wilayas est incessant. Les filles de joie repèrent le client, négocient le tarif et disparaissent dans les bois. Et c’est ainsi toute la journée et tard le soir. Souad, 23 ans, cheveux décolorés et le visage outrageusement fardé, est une habituée des lieux. Elle crèche dans un petit hôtel de Sétif avec de nombreuses filles comme elle. Elle vient d’une ville de l’Ouest et travaille dans ces lieux depuis plusieurs mois.
“Je fais vivre ma famille et c’est le seul boulot que j’ai trouvé après plusieurs tentatives, malgré mon niveau universitaire.” Ces filles ont constitué une clientèle fidèle. Elles se rendent aux marché Dubaï où sont concentrés des centaines d’importateurs d’El Eulma et où affluent quotidiennement des centaines de négociants et de clients.
L’argent y circule à flot. Certains qui y séjournent quelque temps pour leurs affaires commerciales se payent du bon temps. Une aubaine pour celles qui exerce le plus vieux métier du monde. Durant le premier semestre 2006, les éléments de la Gendarmerie nationale ont effectué sept opérations dans ces deux forêts. 27 personnes y ont été appréhendées parmi elles, des propriétaires de bars clandestins. Le plus ancien cimetière d’El Eulma implanté à l’orée de la première forêt n’a pas échappé à ce fléau.
Mur d’enceinte détruit par endroits, tombes dégradées à l’intérieur, sol jonché de détritus de toutes sortes, canette de bières, bouteilles...
Les familles n’osent plus s’y aventurer craignant pour leur sécurité. Même l’imam du lieu a lancé plus d’un appel lors des prêches du vendredi, en vain.

Farid Benabid


Farid Benabid, Liberté

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