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SYNTHÈSE DES TRAVAUX DU SÉMINAIRE INTERNATIONAL

« VILLES ET TERRITOIRES : MUTATIONS ET ENJEUX ACTUELS »

jeudi 17 novembre 2005, par La rédaction


Les exposés d’une cinquantaine de communications se sont articulées autour des thématiques majeures suivantes : l’évolution du système urbain dans sa hiérarchie et ses fonctions, la mobilité et ses implications spatiales, les risques urbains, les acteurs et les pratiques sociales. Ils ont dessiné quelques lignes de force que les débats ont approfondies ou explicitées.

Si certains parmi nous peuvent regretter qu’aient été occultées des notions telles que la crise urbaine ou le projet urbain, elles n’ont sont pas moins sous-jacentes aux différentes interventions.
La diversité des intervenants (géographes, architectes, économistes, aménageurs, paysagistes, biologistes ...) montre combien l’espace géographique et plus particulièrement le fait urbain est au cœur des préoccupations des sciences sociales. La nature interdisciplinaire et complexe de l’espace géographique paraît ne plus se suffire de démarches disciplinaires et exige moins d’occuper un terrain quitte à s’y hasarder sans outils, que de tendre vers leur rencontre par des regards croisés.
La ville au sens d’organisme structurant et producteur de sens est le lieu d’accumulation de la mémoire. Les préoccupations qu’elle suscite, à ce titre, gagnent à être ancrées dans la durée. Elles permettent ainsi de mieux décrypter la genèse des territoires qui ne sont autre que le produit de la cristallisation de l’histoire des sociétés, de ces milliers de gestes de tous les jours, autour d’enjeux politiques, économiques, sociaux, eux-mêmes en mutation constante. Cet ancrage dans la durée révèle souvent les relations privilégiées entre politique et production urbaine. L’ancrage profond du culturel est porteur de spécificité même si aujourd’hui dans le cas algérien, il se réduit à des résurgences après une longue déstructuration.
Les travaux se sont articulés autour de quelques thématiques transversales réunies sous le vocable de mutations :
  La ville dans son territoire, son rôle et ses capacités de structuration territoriale.
  La mobilité apparaît comme une entrée privilégiée par le biais des transports ou des changements de résidence, en rapport avec le développement de l’habitat qui s’avère un facteur essentiel de production de l’urbain sans que pour autant la ville n’émerge nécessairement.
  Les risques environnementaux et sociaux, leur mise en rapport avec les inégalités et les vulnérabilités de la société ont été également un axe essentiel. Aussi, logiquement les franges urbaines constituent une échelle d’observation privilégiée.
  Les transformations urbaines, la genèse des territoires, l’émergence d’acteurs... sont mises en perspective à différents niveaux de l’analyse auxquelles correspondent diverses échelles géographiques.

L’insertion dans l’économie mondiale, principalement dans les segments de distribution qui tiennent à l’international, modèlent les villes algériennes par « le haut » et par « le bas ». Des signes avant-coureurs de métropolisation privilégient Alger parmi les grandes villes, cependant que l’activité d’échanges informelle suscite l’émergence de pôles « économiques » qui n’avaient pas vocation à l’être, articulés sur des réseaux internationaux. A l’échelon inférieur du système urbain et en l’absence d’une base productive, foisonnent des organismes urbains ou infra-urbains difficilement qualifiables de ville et à la durabilité non assurée. Le caractère sélectif de la mondialisation apparaît ici indéniable entre villes qui gagnent et villes qui perdent ; c’est une évolution qui fragilise un système urbain à la base économique désormais fluctuante.
L’approche « actorielle », très présente éclaire les évolutions urbaines, intervenues dans un contexte marqué par l’urgence, la conjoncture et l’informel, ce qui n’implique, toutefois, pas l’absence de tout projet de modernité qui réunisse le consensus sur le fond mais qui, dans ses modalités et sa mise en œuvre suscite, tantôt convergence tantôt divergence entre société et pouvoir(s) politique(s).

Communications et débats appellent l’intervention de l’Etat pour réguler tensions et conflits, pour dispenser des normes consensuelles dont il se porte garant et pour soutenir les initiatives endogènes qui contribuent à une construction concertée du territoire en lieu et place d’éventuelles sécessions susceptibles de déboucher sur des violences non souhaitées. C’est donc un appel à l’interventionnisme rénové de l’Etat qui accompagne des analyses des évolutions qui résultent des choix libéraux et du laisser-faire que les déréglementations impliquent.

- Si l’explosion des transports urbains favorise une plus grande mobilité qui est un des volets du droit à la ville, elle maintient, en revanche, les agrégats d’habitat pauvre dans leur marginalité, le profit étant le mot d’ordre des opérateurs ; elle aggrave en plus les dysfonctionnements urbains.
Combinés avec les stratégies résidentielles, les encouragements publics à l’accès à la propriété et les politiques de relogement des populations des secteurs éradiqués, les transports donnent plus d’élan à la mobilité résidentielle. La faible création de postes de travail et la non migration d’emplois stables depuis les zones centrales favorise un fonctionnement urbain qui consacre la stabilité résidentielle et l’instabilité professionnelle, résultat de l’extension d’une économie informelle partiellement formalisée.

 Les mobilités sont une des entrées à la question de l’étalement urbain, forme excessive de l’expansion urbaine, qu’accompagne, par un paradoxe apparent, le tassement démographique désormais reconnu. L’étalement sous-entend les difficultés de maîtrise confinée dans la simple canalisation de l’expansion qui répond à la baisse des offres foncières et à la nécessité d’accroître une densité urbaine sans cesse en baisse et donc porteuse de consommation d’énergie et de pollution. La recherche investit pourtant plus massivement le thème des nuisances industrielles certes les plus lourdes en raison des conditions qui ont présidé à la genèse de l’appareil industriel et sa faible évolutivité technologique.

 Se trouve ainsi posée la question des rapports entre l’urbain et le rural qui s’expriment en premier lieu dans des complémentarités dont est porteuse la multifonctionnalité en gestation de l’espace agricole périurbain. La formation de territoires ruraux durables semble aujourd’hui en dépendre. Il s’exprime en second lieu dans la perpétuation des formes de transgression et de domination économique : consommation des terres agricoles, report de la croissance urbaine et donc de coûts additionnels sur des collectivités territoriales dotées de faibles ressources, investissement de capitaux urbains dans l’agriculture périurbaine et prélèvement de profits. Les espaces périurbains sont ainsi des lieux d’enjeux qui réclament des arbitrages constants de la puissance publique.

 Canalisée ou non, prenant parfois le nom de ville nouvelle, l’étalement est ici l’expression de la production de l’urbain par le logement. Les filières diversifiées de production immobilière, publique ou privée formelle et informelle, sont apparemment déterminées par l’accessibilité matérielle, véritable accélérateur de production d’espaces ségrégués avec accentuation des contrastes sociaux. Il en résulte un risque de territorialisation sur la base de l’appartenance sociale face à la relative mixité des anciens tissus, mettant en cause la cohésion sociale et territoriale au travers de l’accès inégalitaire aux ressources et particulièrement aux services publics dont la libéralisation est pour l’heure partielle et sélective.

 Les franges urbaines sont ici le lieu de cristallisation des rapports sociaux issus des choix libéraux qui n’ont pas gommé, notamment à l’échelon local, les réflexes anciens d’exercice du pouvoir inhérents à la transition politique et économique, en partie responsables du décalage entre normes et pratiques.
L’habitat spontané des populations à bas revenus y tient une place particulière ; il connaît manifestement une croissance remarquée en particulier dans les villes moyennes et petites après avoir tendu à sa stabilisation. Il forme des marges, zones d’interférences entre mobilité résidentielle populaire volontaire ou contrainte et exode rural relancé, entre pratiques urbaines et rurales, participant ainsi intensément à la structuration sociale très contrastée des franges urbaines.

 Si l’expansion urbaine ne peut être arrêtée, la contenir est un souhait qui fait appel moins au freinage de l’urbanisation qu’à la reconstruction de la ville sur la ville qui gagne à devenir un Projet public qui prend aussi en charge un paysage de qualité qui intègre Culturel et Visuel.

Page réalisée pour Sétif Info par Labo PUVIT (Organisateur du séminaire)

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