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Le club sétifien d’échange de livres

jeudi 6 juillet 2017, par Hamoud ZITOUNI


Les Algériens, envahis par les réseaux sociaux, lisent de moins en moins Ils ont perdus réellement l’intérêt au livre. A voir le très petit nombre de librairies bien achalandées qui restent encore ouvertes, on a tendance à le croire. Pour toute la ville de Sétif, elles ne dépassent pas le nombre des doigts d’une seule main.

Les bibliothèques municipales sont très peu fréquentées. Mais la réalité est probablement plus nuancée : il suffit d’observer les extraordinaires marées humaines qu’attirent chaque automne le Sila (Salon international du livre d’Alger) et les épisodiques et irrégulières foires locales du livre. Comparativement aux sociétés avancées, le livre et la lecture sont peu prisés en Algérie.

En Europe, on lit à la maison, dans le bus, le train et le métro, en salle d’attente, chez le coiffeur, à la plage et à la bibliothèque. Le citoyen peut lire près d’une cinquantaine de livres par an. En Algérie où l’analphabétisme et l’illettrisme ont été sérieusement défaits grâce l’école, il est plutôt rare d’observer ce phénomène social d’attrait à la lecture. Est-ce parce que le livre est relativement cher ? Est-ce parce que les manuels de lecture et les livres de littérature sont mal conçus, rébarbatifs d’aspect, mal imprimés, bourrés même de coquilles, de fautes d’orthographe et de grammaire ? Est-ce à cause des programmes scolaires surchargés, pauvres en pédagogie et de cohérence ? Est-ce à cause de l’accaparement de l’esprit par le smartphone ? Tout un débat …

Pourtant, quelques belles hirondelles donnent espoir dans ce ciel de grisaille intellectuelle. Quelques éditeurs algériens s’appliquent à publier des livres de très bonne qualité d’impression sur divers thèmes. Des jeunes à Batna, Constantine et certainement ailleurs s’acharnent à tenir ouverts des kiosques à livres en libre service, parfois saccagés par des désoeuvrés ou probablement par des nervis commandités. A Alger, les bouquinistes se sont installés dans les allées du square de la grande poste et à Tipaza on organise des séances de lecture et de déclamation de la poésie. Les livres apparaissent dans les quatre langues usitées dans le pays : l’arabe, le français, l’anglais et, depuis peu de temps, en tamazight et la censure et moins pesante sauf lorsqu’il s’agit d’ouvrages appelant à la haine et la violence. La Toile offre, elle aussi, un domaine sans limite de lecture avec le bon, le moins bon, voire l’exécrable. Une chose impensable, inimaginable dans les années 70 et 80. A Sétif, c’est une autre belle initiative qui prend peu à peu corps : c’est le book swap ou l’échange de livres.

Lancé il y a déjà quelques mois par une petite équipe de jeunes bénévoles, ce forum d’échange est déjà à sa septième édition et capte l’intérêt de quelques centaines de visiteurs constitués essentiellement d’étudiants et de lycéens des deux genres. Ils viennent des quartiers de la ville de Sétif, des campus universitaires et aussi de villes d’Ain Azel, d’El Eulma, de Bougaa, d’Ain El Kebira et d’autres villes et villages de la wilaya de Sétif. L’évènement se réalise périodiquement grâce au savoir-faire de Walid et de ses camarades et à l’appui attentionné et efficace du directeur de la maison de la Culture dont elle en assure l’accueil. En ce matin du samedi 1er juillet, la salle qui lui est réservée est déjà pleine à craquer de jeunes gens agglutinés autour des tables où s’exposent les livres à échanger. A côté, une dame architecte, dédicace son propre ouvrage nouvellement édité. Juste à l’entrée, Walid accueille courtoisement ses « clients », examine et évalue les ouvrages proposés à l’échange. L’estimation s’effectue approximativement et rapidement selon l’état général de l’ouvrage, l’intérêt qu’il peut apporter au lecteur, la catégorie de contenu (manuel scolaire ou universitaire, littérature, polar, technique, etc..) et donne lieu à l’octroi de petits bons portant des valeurs scripturales. Après accord de son propriétaire, le livre est alors, estampillé d’un sticker d’une couleur correspondant à la valeur qui lui a été octroyé puis exposé et proposé à changer de main. Les bons serviront à acquérir un ou plusieurs ouvrages exposés à concurrence du montant global de ces petits billets d’échange. C’est un concept simple et opérationnel qui fait le bonheur des uns et des autres au vu de l’affluence de plus en plus forte qu’il suscite auprès des jeunes gens.
Les managers de cette louable initiative disposent d’une page de FaceBook dont voici le lien : https://www.facebook.com/BookSwapSetif/
Bravo pour Walid and co.
Hamoud ZITOUNI.

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