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Décès du Moudjahid Said Goutali

vendredi 8 avril 2016, par La rédaction


Le grand Moudjahid Said Goutali est décédé jeudi à l’âge de 96 ans des suites d’une longue maladie.

Biographie écrite par Elyazid Dib :

Rencontré dans sa nouvelle et modeste demeure sise à la cité des cheminots à Sétif, Saïd Goutali ainsi aurait élit domicile dans la méditation et le recueillement. S’éloignant de quelques encablures de sa maison natale, l’homme tente de justifier cet isolement de par la disponibilité d’infrastructures sanitaires. Mais en somme, croyons-nous comprendre, d’autres ingrédients ont fini par le résoudre à ainsi faire. Les affres du temps, les rappels d’histoires, trop de souvenirs ont-ils été les motifs génésiaques à ce dépaysement ? Pourtant El Eulma, pour lui, est l’unique souffle qui lui reste, c’est l’âme de sa vie et le noyau encore vibrant de son existence. Elle est, cette ville, le berceau de ses chimères, de ses rêveries mais aussi de son existence et de ses vérités. Il y a fait des merveilles. Là où il a vu le jour un certain matin du 8 avril 1920, dans une maison ardoisée et couverte de tuiles marseillaises, est érigée en ce jour une medersa dédiée à l’enseignement coranique.

De ces lointains moments, Hadj Saïd nous extirpa quelques images où il vit venir chez eux, chez son père, gros propriétaire terrien, de hautes personnalités. Il recevait les oulémas, entre autres Ibn Badis et Bachir El Ibrahimi. Dans cette maison, devenue lieu de culte, nous avons trouvé lors de notre passage quelques enfants affairés à transcrire des sourates, non pas par smagh (encre locale faite de cendres de toison ovine imbibée d’eau) sur une louha (support en bois plat destiné à contenir des inscriptions) que l’on peut effacer à l’aide d’une pierre faisant foi de gomme appelée sisal (une matière minérale) mais par Stabilos et marqueurs sur des tablettes magiques.
Sobre et discret, l’homme est introduit par l’un de ses fils Mustapha d’un comportement digne du paternel, dans un salon ordinaire où sont mises en relief et distinctement remarquables à la première vue, les effigies de ses parents. Son père Bakir, décédé le 3 août 1940, et sa mère Zineb ravie aux siens à Tunis durant l’année 1959 pendant la révolution. Tout au long de ses aveux, Hadj Saïd n’épargnait nul détail pour évoquer leur mémoire. Il retient de son père cet effort louable de grande générosité. Bienfaiteur et magnanime, Saïd, enfant unique du couple Bakir/Zineb, aura à faire régner quiétude et mansuétude sur l’ensemble des gens de sa cité.
A l’instigation de son ami et compagnon de jour l’élégant Mohamed Neni, lequel, assistant à l’entretien, recommanda au narrateur de nous dérouler le fil du cas Dambra. En fait, il y avait à El Eulma, dans les années de braise, un cinéma « vogue » géré par un métropolitain français à forte connotation raciste qui s’appelait Dambra (la transcription patronymique n’est que phonique). Un jour ce propriétaire révulsé a décidé d’interdire l’entrée aux Arabes notamment le samedi soir. Que faire face à cet autre déni d’égalité ? Saïd Goutali de concert avec un ami, Harbi Bachagha, décidèrent à leur tour d’offrir un cinéma à la population d’El Eulma. Avant le déclenchement de la révolution, un acte pareil était assimilé à un défi face aux magnats de la finance locale détenue par les colons. Alors que dire de l’acte culturel qui n’était censé être exclusivement qu’européen ? L’Arabe, outre la spoliation de tous droits, n’avait également pas ceux rattachés à la culture, à l’art ou à l’intelligence.

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