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La France et le regroupement familial : L’opposition au test ADN s’amplifie

mardi 16 octobre 2007, , article écrit par M. Meneceur, La Tribune et publié par Nabil Foudi


« Nous sommes là pour entrer en résistance. » Isabelle Adjani a troqué ses habits d’actrice pour ceux de la militante des droits de l’Homme scandalisée par la volonté des législateurs de son pays d’instaurer le test ADN aux enfants des immigrés candidats au regroupement familial. Elle était là, dimanche dernier, comme plus de 6 000 personnes (et d’autres milliers dehors) qui se sont entassées dans la salle du Zénith de Paris, toutes engagées dans l’opposition à l’amendement introduit par un député, certes atténué depuis par les sénateurs (mais il s’agit d’une question de principe), qui fait appel à la biologie pour prouver une filiation.

L’appel lancé par les journaux Libération et Charlie Hebdo, ainsi que l’association SOS Racisme pour ce concert meeting a incontestablement eu un grand écho. C’est donc une réussite. Déjà, à l’initiative d’une pétition « Touche pas à mon ADN » (elle à déjà obtenu plus de 200 000 signatures), les organisateurs ont rassemblé des milliers d’anonymes comme des dizaines de personnalités mobilisées au-delà des idéologies politiques. Des comédiens Adjani, Michel Piccoli, Josiane Balasko, des artistes comme Renaud, des politiques, les socialistes François Hollande et Laurent Fabius, au centriste François Bayrou et au député de l’UMP, François Goulard, le parti du président Sarkozy, aux scientifiques comme le généticien Axel Kahn, ont tenu à transcender leurs positionnements partisans pour marquer leur opposition au test ADN aux étrangers qu’ils considèrent contraire aux valeurs de la République française. Au même moment, l’ancien Premier ministre, Dominique de Villepin, déclarait à la télévision sa désapprobation de l’amendement en réclamant le « retrait pur et simple » du projet de loi. Comme l’avait demandé il y a cinq jours un autre Premier ministre, Edouard Balladur, estimant que l’introduction des tests ADN dans la loi portait « atteinte à l’image et à la réputation » de la France. Le succès du concert meeting de dimanche soir et les prises de position qui se multiplient à droite, même dans les rangs
du gouvernement, contre l’amendement ADN confirment l’amplification d’un mouvement qui met mal à l’aise l’Exécutif au moment où doit se réunir (aujourd’hui) la commission mixte paritaire (7 députés et 7 sénateurs) pour élaborer une version commune aux deux assemblées du projet de loi sur l’immigration. En première lecture, l’amendement adopté par l’Assemblée nationale a été édulcoré par les sénateurs jusqu’à le rendre inapplicable, selon les commentaires des spécialistes. La Haute Chambre a résumé l’amendement en trois points : le test de filiation se fera avec le seul ADN de la mère, les frais financiers seront pris en charge par l’Etat français, l’opération se réalisera sous le contrôle d’un magistrat siégeant à… Nantes.

En acceptant d’introduire l’amendement du député Mariani dans son projet de loi sur la maîtrise de l’immigration, le gouvernement et son ministre compétent, M. Brice Hortefeux, ne savaient certainement pas qu’ils allaient provoquer un mouvement de désapprobation dans la classe politique, y compris parmi leurs partisans, chez les associations de défense des droits de l’Homme et auprès des scientifiques. C’est pour cela qu’à défaut du retrait du projet de loi, l’amendement Mariani, quel que soit le compromis qui interviendrait aujourd’hui entre les sénateurs et les députés, et au regard de la détermination de ses opposants, ne sera pas une affaire classée.


M. Meneceur, La Tribune

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