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L’or pur est sétifien

dimanche 12 avril 2009, , article écrit par zahia eM.G. Sétif Info et publié par La rédaction


Nabil, le noble et savant,

Ton regard, aussi limpide qu’une eau de source des Hauts-Plateaux, éclaire à jamais le chemin de tes cadets qui progressent sur les sentiers ardus de la mission d’informer, de former, de diffuser, d’enseigner.

Sur la toile, en saisissant la première ligne du titre, je tombe en arrêt sur le nom ; c’est bien Nabil. Je m’arrête. Je reprends. Je relie incrédule, pétrifiée. Ô Dieu ! Quelle horrible nouvelle ! Assommée, impossible de rédiger deux lignes qui se tiennent. Rien ne fonctionnait. Non, j’y reviendrai après. Puis à moi-même, comme une litanie, ‘’non, ce n’est pas vrai’’.

Décontracté, talentueux, sans avoir l’air d’y toucher, je le prenais pour un jeune et génial bidouilleur en électronique.

Il met en lumière S’tif-El ‘Ali, Sidi El Khier, Aïn el Fouara, les gorges de Kherrata. Dès le portail franchi, on s’y croirait ; sans oublier l’éternel football, vecteur stratégique de la lutte révolutionnaire comme à Guelma, la sœur voisine. Les multiples rubriques et échanges entre internautes offrent le tableau exaltant la joie de vivre, la générosité des ancêtres des Hauts-Plateaux, en dépit du malheur vécu du 8-MAI. Sétif.Info, c’est lui : tout Sétif et tout lui. Sétif, la ville martyre des carnages de la nuit coloniale, rayonnant jusqu’aux Amériques.

Nous avons noué la relation à l’occasion de la diffusion de quelques analyses historiques qu’il approuvait pour leur précision. Nous étions actionnaires solidaires du patrimoine héréditaire.

Alors, quarante jours déjà. Cela fait-il moins mal ? Sûrement pas. Ni pour moi, ni assurément pour le cercle de ses plus proches.

Ce petit mot, si vain devant ce malheur incommensurable, à quoi bon ? Eh bien, parce que je sais de quoi je parle.

Je me suis retrouvée, il y a quelques années, devant deux jeunes enfants auxquels il fallait répondre : dis, maman, où il est papa ? pourquoi il ne vient plus à la maison ? Le père, devenu absent, était une figure de sa génération d’Algérois : sportif, il aimait traverser la capitale à pied, sa robe noire roulée sous un bras et son cartable au bout de l’autre, échangeant les salutations, les avis, les plaisanteries avec les hommes, les femmes, les jeunes, les anciens. Puis en pleine forme, foudroyé : un an entre le diagnostic fatal et les obsèques.

Inutile de se leurrer, on ne guérit pas de tels coups du sort ! On fait avec… bien obligée, parce que les interrogations, les attentes dans le regard des enfants, il faut bien y répondre, en trouvant au fond de soi-même, comme par miracle, des ressources insoupçonnées.

Je me souviens avoir reçu la visite d’hommes de renom qui me disaient : ‘’moi aussi, j’ai été élevé par ma seule mère. Ce sera difficile, mais avec du courage vous y arriverez ’’.

Sortie d’affaire récemment, assise en face de moi, la fille laisse tomber d’une voix à peine audible : ‘’nous avons tout eu, les soins, les études, les loisirs, les cadeaux, mais personne ne semblait mesurer toute notre peine’’. Il est vrai que je cavalais au quotidien, sans arrêt, contre la montre. Et puis, il fallait avoir l’air de tenir tête au malheur. Aujourd’hui, j’ai même renoué avec des travaux de recherche interrompus.

Alors, les proches, vous ses confrères, ayez toujours en tête le sens du tact. Les enfants sont si fragiles. Leur mémoire est un cristal sur lequel s’incruste le moindre regard, le moindre geste, le moindre mot, la plus infime blessure. Je reste sidérée de les entendre laisser échapper d’imperceptibles et lointains souvenirs.

Avec Nabil, nous avions échangé des courriers à la suite d’un cafouillage malencontreux sur la commémoration du 8-MAI, l’an passé. Après avoir vu les belles photos des enfants scouts, j’avais émis le souhait de me rendre à Sétif à la plus proche occasion. Il m’a assurée qu’il en parlerait lui-même au Wali. Qui pouvait imaginer que cette année, il sera absent physiquement. Oui, physiquement… comme l’attestent les innombrables témoignages : il est éternel dans nos cœurs et notre mémoire.

Etant persuadée, qu’un couple est toujours une paire d’êtres partageant des valeurs communes, qui mieux qu’une mère, sait ce que le père de leurs enfants veut pour eux ? Y Allah, Ya Lalla, courage. Contenez vos larmes, prenez le temps de les regarder grandir et vous rappeler leur père et leur petit frère. Essabar à la notable famille Lalmi, à la grande famille du journalisme, à Sétif l’emblématique, qui perd un de ses dignes fils.

Moi, je continue mes investigations en les perfectionnant, pour mieux mériter ses aimables mots d’encouragements. Il me laisse cela, à ma charge.

Je me fais le serment qu’à mon arrivée sur le sol de la Capitale du 8-Mai, mes premiers pas me mèneront à Sidi El Khier. Si Tawos Amria, grande maintenant, est du voyage, elle ira embrasser Nacira, Narimène, Lydia, Lyès. Dans notre tradition ancestrale, El ‘Aïlla, ce centre nerveux de la pensée et de l’action, s’étend bien au-delà de la seule lignée directe. Nabil en est le fils, le frère, le père toujours présent. Dit-on toujours à Sétif : ‘’ l’or pur est de chez nous ’’.

zahia eM.G. (Paris)


zahia eM.G. Sétif Info

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