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Décès du journaliste et militant Henri Alleg

vendredi 19 juillet 2013, , article écrit par AFP & RFI et publié par La rédaction


Le journaliste algéro-français Henri Alleg, auteur de l’ouvrage "La Question" (1958) qui dénonçait la torture pendant la guerre d’Algérie, est décédé mercredi à Paris à l’âge de 91 ans, a-t-on appris auprès du quotidien l’Humanité dont il fut secrétaire général.

Arrêté pendant la « bataille d’Alger », le 12 juin 1957 par les parachutistes de la 10e D.P. au domicile de son ami Maurice Audin qui mourra sous la torture, Henri Alleg est détenu au secret pendant un mois avant d’être transféré à la prison civile de Barberousse sur les hauteurs de la Casbah d’Alger. Il subira de nombreuses séances de torture et recevra une injection de penthotal utilisé comme « sérum de vérité ». C’est depuis la prison de Barberousse qu’il écrit clandestinement La Question dont il confie le manuscrit, des petits bouts de papier pliés et repliés, à ses avocats.

Préfacée par Sartre, La Question est publiée aux Editions de Minuit le 18 février 1958, et malgré l’interdiction qui la frappe dès le 27 mars, 65 000 exemplaires auront eu le temps d’être écoulés. Deux semaines plus tard, La Question est rééditée en Suisse. Diffusé clandestinement, l’ouvrage sera vendu à 150 000 exemplaires. Toujours détenu, Henri Alleg sera condamné le 15 juin 1960 par le Tribunal permanent des forces armées de Nord-Alger à dix ans de travaux forcés pour « atteinte à la sécurité extérieure de l’Etat et reconstitution de ligue dissoute ».

Le prisonnier Alleg est transféré en France où il est incarcéré à la prison de Rennes. Mais profitant d’un séjour à l’hôpital il s’évade en octobre 1961 et, aidé par des militants communistes, rejoint la Tchécoslovaquie. A la faveur des accords d’Evian il revient en France en 1962 et repart aussi vite à Alger où il entreprend de redonner vie à Alger républicain.

Un engagement au sens fort du terme

Le beau projet ne durera guère ; le coup d’Etat de Houari Boumediène contre Ahmed Ben Bella, en 1965 signe la fin du journal communiste algérien et le retour d’Henri Alleg en France. Il retrouve son métier de journaliste jusqu’en 1980 comme grand reporter à L’Humanité avant d’en devenir le secrétaire général. « J’ai exercé ce métier en militant communiste, animé de convictions, aime-t-il à répéter. Ce fut pour moi un engagement, au sens fort du terme ».

Jamais il n’abandonnera son combat pour que soit levé le voile sur la pratique de la torture en Algérie. Il témoignera en 2001 au procès du général Paul Aussaresses pour dénoncer encore une fois la pratique institutionnalisée de la torture par l’armée française pendant la guerre d’Algérie. En 2000, il signe l’Appel des douze à l’adresse de Jacques Chirac, président de la République, et de Lionel Jospin, Premier ministre, pour condamner la torture par une déclaration publique.

L’ancienne combattante algérienne Louisette Ighilahriz a salué la mémoire d’un homme toujours engagé en faveur « de causes justes ». « Je ressens une grande tristesse car Henri Alleg est mon frère spirituel et mon frère de combat », a déclaré celle qui avait relancé le débat sur la torture dans un témoignage publié par Le Monde en 2001 où elle disait avoir été torturée par des militaires français en 1957.


AFP & RFI

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