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Yamina CHERRAD, une femme d’honneur

samedi 17 mars 2018, par Hamoud ZITOUNI


Ecrire ou lire ou même parler de l’histoire de la guerre de libération datant de plus d’un demi siècle intéresse très peu les jeunes et même les moins jeunes lecteurs algériens. C’est du passé disent ils. Cela leur paraît désuet, ringard, parfois pathétique et même douteux quand la mémoire est sélective et édulcorante. Et puis les péripéties quelque fois sanglantes de la cinquantaine d’années d’indépendance qui ont souvent dénaturé les idéaux de novembre 1954 pour en faire une rente politique préjudiciable à la construction d’une nation forte, solidaire et prospère ont généré le désintérêt à l’expression patriotique, celle-ci étant devenue suspecte aux yeux des jeunes générations.

Alors, quand on découvre, presque au hasard, un récit de première main, relaté par une vraie moudjahida du maquis intérieur, on ne peut que se réconcilier avec le patriotisme vrai, sincère, fait d’abnégation, de courage et de résistance à la limite du supportable.

C’est ce que nous offre à découvrir, avec la modestie qui sied aux gens d’honneur, Mme Yamina CHERRAD, combattante et veuve de chahid, dans son livre intitulé « Six ans de maquis » (éditions EL KALIMA, 2017).

Dans un style sobre qui ne laisse aucune place aux tartarinades et aux discours grandiloquents dont on nous habitué, l’ancienne infirmière du maquis nous fait découvrir la vie des maquisards, ses compagnons et ses compagnes dans les massifs forestiers et les escarpements de Babor, Djebel El Halfa, et des monts de Jijel qui formaient une partie territoriale de la wilaya II historique.

Cette vie mouvante de « merkaz en merkaz » (de poste en poste), en alerte permanente, a duré six ans pour se terminer avec le cessez le feu (19 mars 1962) et la déclaration d’indépendance, deux mois et demi plus tard (5 juillet 1962). Ce fut un quotidien fait de privation, de danger, de sang froid, de soins attentionnés aux blessés, de douleur silencieuse devant les combattants tombés au champ d’honneur, de révolte sourde devant les cruels dégâts de la « bleuite » mais aussi de partage de la galette et de l’espoir. La moudjahida y côtoiera ou rencontrera, au gré de ses déplacements, des figures emblématiques de la révolution : Malika GAID, Malika KHARCHI, Lamine KHANE, Salah BOUBNIDER et celui qui deviendra son futur mari avant de tomber au champ d’honneur, Bachir BENNACEUR. Elle rencontrera aussi d’autres personnes du cru : des combattants ou combattantes de l’ALN dont peu ont survécu au feu ou à la torture de l’armée coloniale ou de simples et pauvres montagnards qui apportaient au prix de leur vie un soutien sans faille aux combattants de l’ALN.

Un récit poignant d’une tranche de vie hors du commun à lire absolument pour mieux comprendre ce grand « miracle » de la révolution algérienne qui après avoir été lancée par une poignée d’hommes visionnaires a été portée jusqu’à son aboutissement par des centaines de milliers d’Algériens. Une lecture qui permettra sans nul doute de renouer avec l’espoir d’une Algérie meilleure pour toutes et tous.

Hamoud ZITOUNI

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