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Une mosquée… et des altérations

vendredi 18 janvier 2013, , article écrit par Yazid Dib et publié par La rédaction


A Sétif, il n’y a pas que la mosquée dite « Mesdjed El Attik » jouxtant la légendaire fontaine Aïn Fouara qui soit investie d’une certaine ancestralité locale. « Djamaa Langar » mosquée du faubourg de la gare, demeure aussi un monument incontournable dans l’histoire contemporaine de la cité.

Située à l’angle de rue Hafid Mohamed pratiquement au centre ville, à une ou deux rues perpendiculaires, à la rue du premier novembre ex-rue de Constantine, la mosquée a été longtemps un lieu, outre de foi et de dévotion, mais aussi un espace de culture et de savoir.

Cette mosquée qui aura pour nom dès 1962 « Abi Dhar El Ghifari », fut inaugurée le 20 octobre 1931. Elle connut un élan nationaliste, à l’instar de tous les lieux de culte musulman, formidable. D’ailleurs cet endroit sera à l’éternité consigné, comme étant le prélude physique au commencement des évènements atroces du 08 mai 1945. C’est d’ici, que la procession initialement anodine et pacifique prit son départ,pour manifester le désarroi populaire. La suite sera connue. Un massacre. Un génocide à grande échelle. La postérité a gardé comme tradition symbolique, cet itinéraire qui d’année en année ne se désemplit pas de marcheurs, venus marquer la souvenance persistante des douloureux évènements. L’honneur de ce quartier un peu mythique est également d’abriter dans un pâté de lots, un autre monument de rayonnement scientifique et religieux. « Madrasset El Feth » qui sous la bénédiction inaugurale du Cheikh El Ibrahimi, connut sa première rentrée le 1 janvier 1950. De souvenir d’enfant, les cris se bousculent encore dans la bouche de ceux qui, mômes entonnaient le tenant lieu de l’Adhan. A savoir « awou échaal ! awou edhrab ! ». Mais aussi aux coups de canons qui rugissaient à partir, nous disaiton, du champ de tir (les 600 logts actuellement). L’on jubilait à cor et à cri en multipliant les appels. L’on ne peut évoquer la mosquée de Langar sans pour autant citer Cheikh Belmeddour, sain et mystique. Il y officiait tel un grand maître spirituel.

Connaissant un rafistolage mal placé en fin d’année 2012 ; elle aurait pu garder ce charme d’antan. Elle aurait pu ne pas se voir profaner par un « modernisme » qui altère dans son sillage toute noblesse d’un passé élogieux. Mettre de la faïencerie mal émaillée, ou tenter de faire une extension imméritée n’est qu’un voeu inutile. A l’origine c’est une mosquée de quartier, donc la prétention de vouloir en faire une mosquée de masse, avec la rationalisation de tout mètre carré n’est pas sans toucher à l’authenticité de l’oeuvre. La cour avec son jet d’eau a disparu. De même que les voûtes minuscules qui ornaient de l’intérieur son entrée. La porte cochère qui jadis faisait une différence, va en toute certitude être remplacée par une vitrerie automatique, ou un quelconque produit de mauvaise ébénisterie. L’on tergiverse encore sur la conservation, la suppression ou la conversion du minbar, un petit ensemble de marches couronné et d’où ont eu à officier Cheikh Benbadis, El Ibrahimi et autres sommités. Enfin elle est devenue une grande salle de prière, dénuée de son âme. L’on ne s’y reconnaît plus en ces décors. Les enfants qui ont grandi entre ses rangs garderont en éternelle souvenance qu’elle fut pour eux un second berceau.


Yazid Dib

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